Se rendre au contenu

Facturation électronique en France : PDP, PEPPOL et perspectives 2026

Calendrier de la facturation électronique obligatoire en France
23 avril 2025 par
Nexelans, Emmanuel Chaumery
| Aucun commentaire pour l'instant

La France prépare la généralisation de la facturation électronique inter-entreprises, avec un nouveau calendrier fixé par la Loi de Finances 2024. L’obligation d’émettre des factures électroniques démarrera le 1er septembre 2026 pour les grandes entreprises et ETI, et le 1er septembre 2027 pour les PME et micro-entreprises​ (validé par un vote de l'Assemblée Nationale début avril 2025). Par ailleurs, toutes les entreprises devront être en mesure de recevoir des factures électroniques dès septembre 2026 economie.gouv.fr. Ce calendrier révisé remplace l’ancien échéancier qui prévoyait un démarrage dès 2024 pour les grands groupes​. En parallèle, l’État avait déjà ajusté son dispositif : le Portail Public de Facturation (PPF), initialement envisagé comme portail gratuit pour tous, aurait finalement un rôle réduit. En effet, la DGFiP a acté en octobre 2024 l’abandon du PPF universel, rendant incontournables les Plateformes de Dématérialisation Partenaires (PDP) pour échanger des factures entre assujettis à la TVA. Concrètement, cela signifie que plus de 7 millions d’entreprises assujetties en France devront transiter par une PDP pour leurs factures électroniques ​itesoft.com (sauf cas particulier des clients non assujettis, où les factures papier/PDF resteront possibles).

Plateformes de Dématérialisation Partenaires (PDP) : état d’avancement en 2025

Les PDP sont des plateformes privées immatriculées par l’État pour acheminer les factures et transmettre les données à l’administration fiscale. Depuis l’ouverture des candidatures fin 2022, le Service d’Immatriculation (SIM) de la DGFiP a reçu 88 dossiers de candidature au statut de PDP. À la date de mars 2025, 86 opérateurs ont obtenu une immatriculation “sous réserve” (provisoire) et seulement 2 dossiers restaient en cours d’instruction itesoft.com. Cette immatriculation sous réserve atteste que le candidat respecte les exigences réglementaires (obligations fiscales, sécurité, etc.) et a fourni toutes les pièces demandées ​impots.gouv.fr. La procédure va maintenant vers une phase de conformité technique : des tests d’échanges entre PDP et de transmission des données seront menés avant la certification définitive. La DGFiP prévoit ainsi des audits et une certification finale des PDP d’ici fin 2025 ​​theinvoicinghub.com, afin qu’elles soient pleinement opérationnelles avant l’échéance de 2026.

  • Nombre de PDP candidates : 88 dossiers déposés fin 2024, dont 86 déjà immatriculés sous réserve (2 en attente)itesoft.com. La liste n’est pas figée, de nouvelles candidatures pouvant encore s’ajouter (la DGFiP estime qu’une centaine de PDP pourraient être immatriculées in fine)​
  • Exemples de PDP immatriculées : On retrouve parmi elles de grands éditeurs ou cabinets bien connus (Accenture, Cegid, EY, Sage, SAP…​impots.gouv.fr) aux côtés de fintechs et start-ups françaises ou européennes (Qonto, Pennylane…​impots.gouv.fr). Cette diversité offre un large choix aux entreprises pour sélectionner leur prestataire.
  • Rôle des PDP : Émettre, transmettre et recevoir les factures au format électronique, extraire les données utiles pour l’administration fiscale, et assurer le e-reporting (transmission des données de transactions non concernées par la facture électronique, comme les opérations B2C ou export. À partir de 2026, toute facture entre assujettis devra nécessairement passer par une PDP, ou par un Opérateur de Dématérialisation (OD) lui-même connecté à une PDP.

Intégration de PEPPOL dans l’écosystème français

Pour assurer l’interconnexion entre toutes ces plateformes, la France mise sur le réseau PEPPOL (Pan-European Public Procurement On-Line). PEPPOL fournit un standard d’échange et un réseau décentralisé permettant la transmission sécurisée de documents (factures, bons de commande, etc.) entre entreprises, indépendamment de leur fournisseur de service. Dans le contexte français, PEPPOL va servir de “langage commun” et de protocole d’interopérabilité par défaut entre PDP. Avec plus de 80 à 100 plateformes amenées à coexister, il serait techniquement impraticable de créer des connexions point-à-point entre chaque PDP (plus de 3 400 liaisons potentielles)​ PEPPOL résout ce défi logistique grâce à un mécanisme de découverte dynamique des destinataires : une PDP pourra trouver automatiquement la bonne plateforme de réception via l’annuaire et acheminer la facture au bon destinataire, même sans connexion préétablie ​serensia.com.

L’administration française a ainsi annoncé la mise en place d’une autorité PEPPOL France, chargée de gouverner l’interopérabilité entre PDP et la bonne application du réseau theinvoicinghub.com. De nombreux acteurs du marché avaient déjà l’habitude d’utiliser PEPPOL pour des échanges de factures électroniques, et des tests (POC) ont été menés dès 2024 dans le cadre de la réforme. L’intégration au réseau PEPPOL va devenir une obligation pour toutes les PDP françaises, afin de gérer l’ensemble des flux entre elles optionfinance.fr. D’après les professionnels impliqués, la partie PEPPOL du système français était prévue pour entrer en production à partir de février 2025, ce qui permettrait de commencer à tester les échanges de factures via PEPPOL entre différentes PDP dès 2025. En complément, un “Annuaire” central des entreprises assujetties sera déployé (tests qui étaient annoncés début 2025) pour associer chaque SIREN/SIRET à sa PDP de prédilection ​theinvoicinghub.com et faciliter le routage des factures.

PEPPOL va-t-il remplacer les PDP en 2026, ou sont-ils complémentaires ?

Dans les débats autour de l’architecture cible, une question se pose : à l’horizon 2026, le réseau européen PEPPOL pourrait-il rendre le dispositif des PDP obsolète, ou bien ces deux éléments fonctionneront-ils de pair ? À ce stade, la stratégie retenue est clairement la complémentarité. Les PDP demeurent au cœur du système car elles portent des obligations spécifiques (contrôles fiscaux, transmission des données TVA à l’administration, archivage conforme, etc.) qu’un simple réseau ne suffit pas à couvrir. PEPPOL est quant à lui l’infrastructure qui permet aux PDP d’échanger entre elles, un peu à la manière d’un réseau téléphonique commun reliant différents opérateurs. Autrement dit, chaque PDP française sera un nœud du réseau PEPPOL, mais devra aussi remplir les exigences nationales (immatriculation, conformité à la norme française, connexion à l’administration fiscale). Le ministère des Finances a souligné cette interdépendance en rappelant que les PDP devront être interopérables entre elles, objectif “inatteignable via des liaisons point-à-point classiques” et qui nécessite un réseau décentralisé de type PEPPOL theinvoicinghub.com.

Ainsi, en 2026, PDP et PEPPOL seraient deux facettes du dispositif : les entreprises passeront par une PDP de leur choix (ou par le portail public dans certains cas limités) pour émettre leurs factures, et cette PDP utilisera le réseau PEPPOL pour acheminer la facture au bon destinataire (une autre PDP) si besoin. Il n’est pas envisagé à court terme que n’importe quel prestataire PEPPOL non immatriculé puisse envoyer des factures en dehors du cadre PDP, car la réforme française garde le principe d’opérateurs accrédités assurant la conformité fiscale. En revanche, on peut anticiper qu’à plus long terme, l’harmonisation européenne (projet de « VAT in the Digital Age » de la Commission européenne) pourrait rapprocher les modèles. Pour l’heure, les autorités françaises réaffirment le maintien du rôle des PDP en complément du réseau PEPPOL, et travaillent à encadrer cette interaction via une norme nationale (NF) en cours d’élaboration​ theinvoicinghub.com​. Cette future norme, pilotée par l’Afnor avec la DGFiP/AIFE, vise à définir précisément les processus d’échange (formats, statuts, cycle de vie des factures, e-reporting, etc.) que toutes les PDP devront supporter​. Elle devrait être publiée en 2025 et intégrée dans le cadre juridique (ordonnance) d’ici fin du premier semestre 2025, offrant ainsi une base homogène à l’ensemble du marché. Comme l’indique un représentant de Basware, “nous tendons désormais vers une uniformisation qui est globalement positive pour l’ensemble des acteurs, pour les PDP et surtout pour les entreprises”, permettant à ces dernières de changer de prestataire plus facilement si besoin, grâce à des standards commun.

Odoo en route pour devenir PDP en 2025

Parmi les éditeurs de solutions de gestion intéressés par ce nouveau marché, Odoo – l’ERP open-source bien implanté chez les PME – a annoncé son ambition de devenir lui-même une PDP agréée. L’éditeur belge (dont la France est l’un des principaux marchés) souhaite ainsi permettre à ses clients d’émettre et recevoir des factures électroniques nativement via la plateforme Odoo, sans passer par un intermédiaire PDP tiers. D’après les informations communiquées par Odoo, l’entreprise vise une immatriculation effective en 2025, possiblement à partir de mai 2025. Cela implique de se conformer au cahier des charges technique et réglementaire exigeant de la DGFiP – un chantier de taille, mais qui pourrait apporter à Odoo un avantage compétitif important sur le marché français. À ce jour (avril 2025), Odoo n’apparaît pas encore dans la liste officielle des PDP immatriculées ou candidates ​impots.gouv.fr, ce qui laisse penser que le dossier est en cours de constitution. Si Odoo réussit à obtenir le statut de PDP, ses utilisateurs pourraient, dès l’entrée en vigueur de l’obligation, gérer l’intégralité de leur facturation électronique au sein de leur ERP, depuis l’émission de Factur-X (format mixte PDF+XML) jusqu’à la transmission aux clients via PEPPOL et au reporting TVA vers l’administration. Cette démarche s’inscrit dans une tendance plus large où les éditeurs de logiciels financiers intègrent la fonction “facturation électronique” de bout en bout, à l’instar d’autres candidats PDP comme Sage ou Cegid déjà immatriculés. Pour les entreprises clientes, cela promet une simplification : moins d’outils différents à mobiliser et une automatisation poussée du processus de facturation. Il conviendra de suivre les annonces officielles dans les prochains mois pour confirmer l’entrée d’Odoo dans le club des PDP certifiés.

Autres évolutions réglementaires et stratégiques marquantes en 2025

L’année 2025 est riche en préparatifs et ajustements autour de la facturation électronique obligatoire. Au-delà des points précédents, voici d’autres éléments importants à retenir pour les entreprises françaises :

  • Nouveau cadre légal et normatif en préparation : Le gouvernement a prévu d’actualiser le cadre juridique de la réforme d’ici mi-2025 pour y intégrer la nouvelle norme Afnor et les spécifications actualisées. Un décret publié en mars 2024 (n°2024-266) a d’ores et déjà entériné le décalage du calendrier et mis en place un régime transitoire d’immatriculation des PDP en attendant la disponibilité de l’environnement de tests du portail public ​economie.gouv.fr. La publication des “Spécifications externes” v2 du système de facturation électronique (document technique de référence) était programmée pour fin 2024​​ theinvoicinghub.com, intégrant la réduction de périmètre du PPF et les modalités d’interopérabilité via PEPPOL. Ces clarifications sont très attendues par les éditeurs et PDP pour finaliser leurs solutions.
  • Accompagnement des entreprises et phase pilote : Face au report à 2026, les pouvoirs publics mettent l’accent sur la préparation progressive. Une phase de test élargie pourrait être mise en place en 2024-2025, encourageant les entreprises volontaires à émettre des factures électroniques en avance afin de rôder le dispositif. Des communications officielles (DGFiP, AIFE) invitent les entreprises à anticiper la transition malgré le nouveau délai, en choisissant dès maintenant une solution compatible (PDP ou OD) et en se familiarisant avec les formats (Factur-X, XML UBL, etc.). Par ailleurs, l’Etat et divers organismes (Médiateur des entreprises, France Num) multiplient les webinaires, guides pratiques et FAQ pour accompagner surtout les PME/TPE dans cette transformation numérique majeure.
  • Enjeux business et stratégiques : La facturation électronique obligatoire ne relève pas que de la conformité fiscale – elle représente aussi une opportunité d’amélioration des processus comptables (automatisation, réduction des erreurs), de gain de productivité et de suivi en temps réel de l’activité. Les Directeurs Administratifs et Financiers (DAF) et chefs d’entreprise sont attentifs aux choix à opérer : le choix de la PDP ou de l’ERP capable de gérer les e-factures sera stratégique. Il convient d’évaluer les offres des PDP (coûts, services additionnels comme l’archivage ou l’analyse des données, capacité à gérer l’international, etc.) et la facilité d’intégration avec le SI existant. Certains acteurs proposent des portails “freemium” pour les petites entreprises, ou des intégrations directes aux logiciels de compta/ERP pour simplifier l’adoption. L’annonce de la volonté d’Odoo de devenir PDP s’inscrit dans ce contexte concurrentiel où chaque fournisseur de solutions veut rassurer ses clients sur sa capacité à les mettre en conformité en 2026.

En synthèse, 2025 est une année charnière où se dessinent les contours définitifs de la réforme. Les entreprises françaises disposent de quelques trimestres supplémentaires pour se préparer, mais les chantiers à mener (choix d’une solution, adaptation des systèmes, formation des équipes) restent conséquents. L’État, de son côté, finalise l’écosystème réglementaire et technique : immatriculation des PDP, alignement sur PEPPOL, standardisation des processus. “La réforme de la facture électronique représente une avancée significative vers un système de gestion des factures plus efficace et transparent” note un expert, grâce à l’interopérabilité et la collecte en temps réel des données ​serensia.com. Pour les directions financières, le mot d’ordre est à l’anticipation et au suivi de ces actualités, afin d’aborder sereinement l’échéance de 2026 avec les bons partenaires et les bons outils en place.

Les informations présentées dans cet article proviennent de sources officielles et réputées fiables. Toutefois, il appartient à chaque lecteur de vérifier auprès d’un partenaire légal (avocat, expert-comptable, consultant spécialisé) toute information jugée importante avant toute décision stratégique.

Se connecter pour laisser un commentaire.